Maxime Raulin à Toulouse – publié le 14 décembre 2024 à 06h30
Début décembre, Ange Capuozzo nous a reçus chez lui à Toulouse. Pendant près d’une heure, l’arrière ou ailier (25 ans, 23 sélections) est revenu sur la période sombre traversée en décembre 2023, au sortir de sa première Coupe du monde avec l’Italie. L’envie, le plaisir et les émotions n’étaient plus au rendez-vous. Il n’a pas fait de dépression au sens propre du terme (voir encadré), mais a accepté de se livrer sur ce sujet si délicat de la santé mentale encore tabou dans le monde du rugby. Il a également souhaité prendre la parole pour montrer que les sportifs de haut niveau ont aussi des faiblesses. Avec ce message fort : « Une issue existe toujours ! »
Vous revenez en club, mais vous enchaînez avec une blessure à une cuisse (six semaines d’absence). Vous traversez une période sombre…
Plusieurs semaines oui… Il faut aussi remettre un peu de contexte. J’étais parti de la maison depuis trois mois, quasi non-stop avec mes partenaires de la sélection italienne durant lesquels vous donnez tout pour cet objectif. Du jour au lendemain, tout s’arrête. Il a été très difficile de retrouver un quotidien. Il a été également difficile d’en parler, de l’extérioriser.
Pourquoi ?
Parce qu’il y a plus grave. Se plaindre de ça pourrait être assimilé à un problème de riche…
Quand avez-vous compris que vous traversiez une période difficile psychologiquement ?
Pas tout de suite. Au fond de moi, je le savais, mais je n’ai rien dit. Je ne m’autorisais pas à vivre ce genre de chose. Je n’avais pas le droit.
Parce que vous êtes sportif de haut niveau et qu’il faut paraitre fort ?
Non, le rugby n’impose pas cette notion de virilité. C’était une forme d’humilité vis-à-vis de ceux qui galèrent plus que moi, qui ont des problèmes de santé, d’argent. Je ne voulais pas me plaindre alors que je venais de vivre une Coupe du monde et que je joue dans le meilleur club du monde.
L’image que les rugbymen renvoient est donc éloignée de la réalité…
Nous sommes le reflet de la société. Comme dans d’autres secteurs d’activité, d’autres métiers, les problématiques rencontrées sont les mêmes dans un club : les liens humains, la pression du résultat. Tous ces sujets sensibles, présents dans les entreprises, sont transposables à une équipe de rugby. Il y a en plus l’exposition médiatique, qu’elle soit positive ou négative, l’impact est très important. Ça engendre des émotions. Les réseaux sociaux amènent beaucoup de positif, mais aussi des dangers. Notre santé mentale est mise à rude épreuve.